Les Reposoirs de la procession

du 9 mars au 11 mai 2019

Exposition personnelle de Loïc Le Groumellec.

La Galerie Karsten Greve a le grand plaisir de présenter la nouvelle exposition du peintre français Loïc Le Groumellec. L’artiste, représenté par la galerie depuis 1989, dévoile à cette occasion une quarantaine d’œuvres inédites de la série Écritures, à laquelle il se consacre depuis 2015. À cette occasion la galerie est ravie de publier son troisième catalogue de l’artiste. Dans les salles de la galerie, les peintures à l’huile et les gouaches sur papier dialoguent avec les Chapelles/Reposoirs, architectures en bois qui accueillent son œuvre à la manière d’un corps sacré, créant une mise en scène imprégnée par la sensation d’une mystérieuse présence ésotérique.

Né en Bretagne en 1957, Loïc Le Groumellec obtient son diplôme à l’école de Beaux-Arts de Rennes en 1980. Sa recherche s’éloigne aussitôt des courants figuratifs très populaires parmi les jeunes peintres français de sa génération, séduits tant par les subcultures triviales comme la bande dessinée – c’est le cas entre autres de Robert Combas – que par les possibles hybridations entre l’iconographie pop et une peinture de style expressionniste – comme c’est le cas pour Jean-Michel Albérola. Le Groumellec au contraire choisit de réduire au maximum ses motifs et sa palette pour revenir aux origines de la création picturale. Il découvre les sites archéologiques bretons du Néolithique et reste fasciné par la simplicité formelle de leurs constructions et par l’énigme de leur fonction. Tout particulièrement les menhirs alignés du site de Carnac et les indéchiffrables incisions du cairn de l’île de Gavrinis, dans le Golfe du Morbihan, deviennent la source principale de son imaginaire. En 1983 le CAPC de Bordeaux lui achète deux tableaux que l’on considère comme le commencement et la somme de toutes ses futures recherches : une peinture de la série des Mégalithes et une deuxième de la série des Écritures, qu’il ne reprendra systématiquement qu’à partir de 2015. Les Mégalithes occuperont la quasi-totalité de la production de l’artiste pendant trente ans. Il s’agit de peintures à la laque peuplées de formes noires, élémentaires et silencieuses qui s’étalent sur un fond opalescent par lequel elles semblent être piégées. Dans ces peintures toute tridimensionnalité est bannie et l’observateur se trouve face à des formes stoïques, énigmatiques, qui s’érigent muettes devant lui.

Plus qu’une inspiration directe, les mégalithes sont pour Le Groumellec ce qu’étaient les bouteilles pour Giorgio Morandi : des prétextes issus du monde réel pour questionner le sens ultime de la peinture. Cela explique également la persistance du motif tant dans l’œuvre du maître italien que dans celle de l’artiste français. Faire et refaire le même tableau, qui n’est pourtant jamais le même, sonder toutes les possibilités et les variations infinitésimales pour arriver à l’essence de la forme. La quête d’un minimalisme sensible – où l’on peut encore profiter des imprévus du travail manuel – ainsi que d’une répétition qui n’est jamais totalement systématique, met en relation le travail de Le Groumellec avec les empreintes de pinceau réitérées de Niele Toroni, artiste auquel il fait souvent référence. L’idée de la trace revient dans la série des Écritures : sur un fond brun, qui vibre de lumière grâce aux couches de peinture diluée qui se superposent sur la toile, se profilent d’énigmatiques arches concentriques. Ces signes, provenant toujours de l’imaginaire breton, font écho aux gravures murales de la chambre funéraire mégalithique de Gavrinis, dont les archéologues ne sont pas encore parvenus à déchiffrer la nature : décor ou langage ? Ils restent donc pour nous une écriture sans code, pure forme sans signification. Toute l’œuvre de Le Groumellec porte ainsi sur le rapport de la création avec l’absence. Son imaginaire de référence est fait d’énigmes et de vides : le menhir est une construction primitive dont nous ne connaissons pas la fonction et les signes gravés du cairn breton sont les traces d’un langage qui a perdu son code, renonçant à tout pouvoir de communication.

Un grand mystère anime ainsi les œuvres de Loïc Le Groumellec. L’insondable présence des figures massives dans la série des Mégalithes ainsi que l’énergie hypnotique des nouvelles Écritures leur confèrent une grande spiritualité, qui se fait encore plus tangible dans les Chapelles/Reposoirs disséminées dans les salles de la galerie. Comme les édicules éphémères, généralement construits par les paysans, qui abritent les statues des saints à chaque étape de la Troménie de Saint Ronan (procession religieuse parmi les plus anciennes de France qui a lieu une fois par an à Locronan, en Bretagne), ces structures en bois encadrent et protègent les Écritures. L’attention aux éléments du folklore, et la volonté de les revaloriser dans leur aspect abstrait, idéal, rapproche la démarche de Le Groumellec à celle de Constantin Brancusi qui lui également utilisait les symboles de son folklore roumain dans sa recherche artistique et Brancusi est une des références majeures pour Le Groumellec. Il revient donc ici à la forme concave archétypique de la grotte ou de la cabane, qui est généralement associée au désir de préservation de ce qui est précieux et qui renvoie à une idée du sacré et de spiritualité partagée par les cultures du monde entier. Dans l’œuvre de Le Groumellec, la chapelle/reposoir sacralise non pas le tableau en tant qu’objet, mais la peinture comme symbole de la création artistique. Ces réceptacles, avec leur référence au pèlerinage, deviennent métaphores du chemin que l’artiste entreprend dans sa recherche de l’essence ultime de l’art.

Dates
9 mars - 11 mai 2019
Horaires
Du mardi au samedi, de 11h à 19h
Lundi sur rendez-vous
Entrée libre
Visites
Visites commentées gratuites
mercredi 12h, samedi 12h et 16h