Donald Judd

Courtesy of Thaddaeus Ropac gallery.
Courtesy of Thaddaeus Ropac gallery.
du 6 avril au 15 juin 2019

Exposition personnelle.

La Galerie Thaddaeus Ropac a le plaisir de présenter la première exposition de l’artiste américain Donald Judd (1928-1994) en France depuis 18 ans. Flavin Judd, le fils de l’artiste et directeur artistique de la Judd Foundation, est le commissaire de cette exposition qui marque la première collaboration de la galerie avec la Judd Foundation, dont elle assure la représentation depuis novembre 2018.

Considéré comme l’un des artistes les plus influents de l’après-guerre, Donald Judd a développé un vocabulaire visuel unique en rupture avec les conventions de la sculpture moderne et a créé un art non-représentationnel qui n’existe que par sa propre présence physique.

A travers une sélection d’œuvres majeures choisies par Flavin Judd, l’exposition couvre trois décennies de création, de 1963 à 1993. Avec un accent porté sur les pièces au sol et les œuvres murales, celle-ci présente un vaste aperçu de l’utilisation spécifique que Judd a fait de matériaux industriels tels que le contreplaqué, l’aluminium et les plaques d’acrylique. Les œuvres révèlent une recherche ininterrompue sur la nature de l’espace, de la forme et de la matière et témoignent de la place essentielle que tient la couleur dans l’œuvre de Judd.

L’exposition comprend des œuvres phares telles que l’une de ses premières pièces au sol de 1963, une œuvre murale appartenant à la série des « progressions », une grande pièce au sol en aluminium avec une plaque d’acrylique comme séparateur, et un ensemble de ses œuvres murales rectangulaires produites en 1991. Dans la galerie du premier étage, un ensemble de 15 aquatintes, un groupe de gravures sur bois et des sérigraphies seront présentés ainsi qu’un exemple de mobilier créé par Judd, le Plywood Bench 76.

Dans son essai pour le catalogue l’exposition, Flavin Judd décrit ce qui constitue l’essence de l’art de son père : « Don disait qu’il voulait faire un art qui était « tout à la fois », compréhensible d’un seul regard en quelque sorte. Non pas qu’il suffisait d’une seconde pour le voir, mais plutôt que l’on comprenait qu’il ne contenait aucune contradiction interne, qu’il était ouvert aux possibles. Pour lui, l’œuvre pouvait avoir un mystère car il y avait quelque chose qui était là, que l’on ne saisissait pas encore, mais avec le temps cela deviendrait clair. Don voulait créer un art du présent, contre le temps et contre le récit, comme un film qui dévoile tous ses plans à la fois, rapide et immédiat, nul besoin de traduction, ni de langage, ni d’explications. Don voulait faire un art qui traitait la réalité directement et ne participait pas à l’adapter à l’homme. Il y a pour lui une ligne directe qui mène d’un art clair à une pensée claire puis à une position morale et politique claire et enfin à une manière de vivre. Le fondement de l’art, du design, de tout, est de comprendre le monde physique et non de le contredire. »

L’exposition présente l’une des premières œuvres tridimensionnelles de Judd, untitled 1963, montrée pour la première fois en France. Inspirée directement de ses premières peintures, qui employaient déjà la même teinte rouge cadmium, cette œuvre correspond au moment où l’artiste passe définitivement de la peinture aux œuvres en trois dimensions ; elle marque un passage décisif vers « l’espace réel ». L’emploi de formes rectangulaires, à angle droit au sol, a libéré Judd du plan unidimensionnel de la peinture, ouvrant la voie à ses œuvres les plus connues.

Guidé d’un empirisme pragmatique, Judd a révolutionné l’approche traditionnelle de la sculpture en mettant l’accent sur le volume, sur la clarté de la structure et la simplicité de la forme. Judd a ainsi cherché à exposer la pureté des matériaux simplement « pour ce qu’ils sont, pour les qualités qu’ils possèdent ». L’artiste s’est exprimé plus tard au sujet de son basculement vers la tridimensionnalité: « Cette nouvelle œuvre semblait marquer le début de ma propre liberté, offrant des possibilités pour toute une vie ».

Flavin Judd commente cette transition décisive : « Après les premières œuvres en bois peint de 1963, Don a commencé à travailler avec de fines plaques de métal. Cela lui a permis de réaliser des œuvres de plus grandes dimensions et qui pouvaient se projeter plus loin du mur que ne lui permettait l’utilisation du bois à cause du poids. Avec cette transition, il s’éloigne de la peinture et de la sculpture classiques pour s’orienter vers des œuvres qui lui sont propres, qui (…) l’intéressent indépendamment des préoccupations habituellement admises dans l’art et dans l’histoire de l’art ».

Par la suite, Judd développa des « progressions » horizontales qui incorporent l’absence de l’espace dans leur structure. Dans untitled, 1970, un tube central en aluminium est placé au dessus d’un ensemble de huit boîtes en aluminium violet dont la longueur croît progressivement. D’une longueur de plus de 6 mètres, l’œuvre domine le plus long mur de la galerie, invitant le spectateur à se déplacer autour d’elle pour saisir sa logique interne. L’agencement de l’espace vide, défini et circonscrit entre les matériaux, est une préoccupation centrale de Judd, qui le considérait comme aussi important que les matériaux tangibles.

Au centre de la galerie, un grand cube ouvert d’un mètre de haut en aluminium anodisé révèle le bleu profond de sa face interne. Untitled, 1989, est remarquable par son traitement du volume, du matériau et surtout de la couleur. L’œuvre a été conçue à l’origine pour être exposée avec 11 autres variantes à la Staatliche Kunsthalle Baden-Baden, en Allemagne, en 1989. Le traitement spécifique de l’aluminium anodisé permet d’obtenir une surface qui réfléchit subtilement les modulations de la lumière naturelle environnante. Par conséquent, l’intérieur légèrement miroitant du cadre en aluminium se réfléchit sur la base en acrylique d’une luminosité intense, soulignant ainsi le volume à l’intérieur de l’œuvre.

Dans la série d’œuvres murales en aluminium anodisé exposées, des plaques d’acrylique aux couleurs et aux degrés d’opacité variés donnent la sensation d’une couleur et d’une profondeur illimitées, qui varie en fonction de la position et de la hauteur du spectateur. Par exemple, dans untitled, 1991, des plaques d’acrylique jaune et noire sont superposées pour rendre un « vert doré » unique et indéfinissable, qui se reflète dans le cadre en aluminium et qui permet à Judd de créer de nouvelles couleurs. La combinaison précise de matériaux, de séparateurs et de couleurs variées est caractéristique de ces œuvres individuelles. D’une simplicité trompeuse dans sa forme, l’œuvre de Judd crée une expérience perceptuelle complexe à travers l’interaction et le contraste des matériaux. Judd décrit son intention vingt ans avant de produire ces œuvres dans un entretien à Artforum en 1971 : « l’intérieur est radicalement différent de l’extérieur. Alors que l’extérieur est défini et rigoureux, l’intérieur est indéfini. »

Cette interaction nous ramène aux aspects fondamentaux dans lesquels nous faisons l’expérience de la  sculpture et, en définitive, le monde réel. Artiste et penseur qui cherchait « l’expression simple d’une pensée complexe », Judd pousse le spectateur à considérer ce que nous entendons par « expérience » dans sa forme la plus élémentaire : « En regardant, vous comprenez : c’est plus que vous ne pouvez décrire. Vous regardez et pensez, regardez et pensez jusqu’à ce que ça ait un sens, que ça devienne intéressant. »

Cette exposition sera accompagnée d’une publication comprenant un essai de l’historienne de l’art Catherine Millet, un texte de Flavin Judd ainsi que l’essai fondamental de l’artiste Quelques aspects de la couleur en général et du rouge et noir en particulier.

Une sélection d’œuvres monumentales de Donald Judd est actuellement exposée à la Galerie Thaddaeus Ropac Pantin dans le cadre de l’exposition Monumental Minimal qui a été prolongée jusqu’au 27 avril 2019.

Dates
6 avril - 15 juin 2019
Horaires
Du mardi au samedi, de 11h à 19h
Lundi sur rendez-vous
Entrée libre
Visites
Visites commentées gratuites
mercredi 12h, samedi 12h et 16h