Lizzy Mercier-Descloux
(1956-2004)
Le monde de l’art use, et abuse parfois, du terme d’ « artiste pour artistes » pour désigner les artistes qui, s’ils-elles ne sont pas connu.e.s du grand public, représentent néanmoins des influences majeures pour d’autres artistes. Le terme en tout cas convient parfaitement à Lizzy Mercier Descloux, sans doute la musicienne et chanteuse française la plus aventureuse et la plus avant-gardiste des années 70 et 80, culte et toujours inconnue.
Étudiante à l’école des Beaux-Arts de Paris au milieu des années 1970, elle fréquente Harry Cover, le magasin de t-shirts et de disques d’import que tient Michel Esteban rue des Halles, à l’époque quartier interlope en lisière de l’immense chantier du Forum qui troue Paris. Avec Esteban, elle se rend à New York en 1975 où elle rencontre Patti Smith et Richard Hell, voit les Ramones jouer au CBGB. Lizzy et Michel décident de relater l’émergence de cette nouvelle scène, et publient le premier numéro d’un magazine, Rock News, à Paris en janvier 1976, au même moment que la revue new-yorkaise Punk. La même année, elle publie son unique recueil de poèmes, dessins et collages, Desiderata, avec les contributions de Patti Smith et de Richard Hell. Après sept numéros de Rock News qui documentent la scène punk new yorkaise, Lizzy et Michel s’installent durablement à New York où ce dernier fonde le label ZE Records qui va produire, de manière éclectique, les disques des principaux groupes new yorkais de la discordante No Wave (Lydia Lunch, Suicide, James Chance), en même temps que d’humoristiques projets disco-funk, menés notamment par Kid Creole ou Don Armando. Lizzy Mercier Descloux participe de ces deux tendances, expérimentale avec l’éphémère groupe Rosa Yemen, et plus festive avec Aural Exciter, qu’elle va très vite indissociablement lier dès son premier album en 1979, Press Color. Le phrasé parlé, les paroles fantasques aux nombreux jeux de mots intraduisibles, et surtout l’éclectisme musical de Lizzy Mercier Descloux, qui anticipe de plusieurs années les fusions de la World Music, déconcertent et elle ne trouve que tardivement un public, alors qu’elle continue d’enregistrer, aux Bahamas, puis en Afrique sur les traces d’Arthur Rimbaud en Ethiopie et en Afrique du Sud. Quatre albums – Mambo Nassau, Zulu Rock, One for the Soul et Suspense – verront le jour au cours des années 1980. Après avoir vécu aux Antilles, elle s’installe en Corse dans les années 1990 où elle se consacre à la peinture, avant d’être emportée par un cancer en 2004.