Évènement

Chen Zhen

Mercredi 23 février 2000 à 19h

Chen Zhen, artiste né en Chine, il vit depuis 15 ans en France. Elevé pendant la révolution culturelle et en même temps dans la culture traditionnelle chinoise.

Il a entre autres, participé à la 4e Biennale de Lyon, en 1997 et à la Biennale de Venise en 1999. Ses oeuvres se réfèrent à la tradition bouddhiste et à la modernité.

Jean-Hubert Martin, aujourd’hui directeur de la fondation Ehrenhof à Düsseldorf, fut le conservateur du Musée d’Art d’Afrique et d’Océanie, du Musée National d’Art Moderne du Centre Georges Pompidou, commissaire de nombreuses expositions dont la plus célèbre Les Magiciens de la Terre, en 1989.
Il prépare la prochaine Biennale de Lyon.

L’exposition Les magiciens de la Terre réunissait les créations d’artistes contemporains occidentaux et non-occidentaux ; elle a démontré qu’il existait une création contemporaine ailleurs qu’en occident et a permis de prendre conscience de l’art international.
Depuis, la participation des artistes non-occidentaux dans les grandes manifestations internationales s’est généralisée. Ces artistes ont pu être introduits dans les circuits occidentaux, se sont parfois installés en occident, ont été représentés dans les grandes galeries internationales. Cette exposition a changé la situation.

Jean-Hubert Martin : Au début du siècle, des artistes comme Gauguin, Picasso ou encore les artistes surréalistes, s’étaient intéressés aux formes artistiques non occidentales océaniennes et Africaines. Ils s’étaient nourris de ces formes pour leurs propres recherches. Mais trop soucieux de leur propre reconnaissance, à cause de l’éloignement géographique et d’un accès assez limité à ces oeuvres, ils ne s’étaient pas du tout intéressés aux artistes qui leur étaient contemporains, et à leur individualité.
De plus, on n’a cessé de rendre l’art dit  » primitif  » plus ancien qu’il ne l’est en réalité. Les oeuvres d’art dites  » primitives  » ne peuvent vivre plus d’un siècle, à cause, principalement, des conditions climatiques dans lesquelles elles sont conservées. En raison de cette fausse idée, les artistes occidentaux n’ont jamais souhaité reconnaître la contemporanéité de ces oeuvres.
Les occidentaux se sont servis de ces oeuvres sans se soucier de leur appartenance, ni du copyright.

Chen Zhen : Au moment des Magiciens de la Terre, le choix des artistes chinois n’étaient pas simple. Ces artistes faisaient encore beaucoup référence aux images traditionnelles (dragons, …). La culture chinoise est compliquée et les artistes sont très variés.
Depuis 1989 la vision de l’art international a changé, les collectionneurs ne savent plus quoi acheter. Aujourd’hui, artistes et collectionneurs sont fatigués de cette mondialisation, il y a trop d’expositions internationales, trop de Biennales…

Cette mondialisation retourne aujourd’hui les problèmes : avant, tous les chemins d’immigration des artistes partaient des pays pauvres vers les pays riches. Aujourd’hui le phénomène s’inverse, il y a une  » décentralisation  » des artistes.

L’avenir de l’artiste est de découvrir de nouvelles cultures, de voyager et de s’installer pour approfondir la relation aux nouvelles cultures et de trouver sa place dans l’espace.
Il faut aujourd’hui penser de façon stratégique pour réunir les cultures avec une recherche unitaire plutôt que des expositions et des Biennales successives.

Projet pour Tel-Aviv : lits et chaises transformés en tambours.
Projet pour le Brésil : travail avec les enfants de la rue qui fabriquent des maisons avec des bougies. Le but est de leur faire retrouver le chemin de leur famille et des structures scolaires.

L’exposition Les magiciens de la Terre a démontré qu’il n’y a pas d’incompatibilté entre art religieux et art contemporain.

Jean-Hubert Martin : le musée est le lieu où l’on a commencé à exposer des objets religieux hors de leur contexte. Aujourd’hui on s’interroge sur la possibilité d’exposer des objets religieux contemporain sous prétexte que la religion ne peut exister dans des sociétés industrielles. Or il existe un art religieux contemporain. Pourquoi la société industrielle impliquerait-elle l’annulation de l’art religieux ? Il n’est donc pas impossible pour un musée d’art moderne d’exposer des oeuvres religieuses.

Au moment des Magiciens de la Terre, on avait critiqué l’exotisme de certains artistes.

Jean-Hubert Martin : Je cherche depuis à revaloriser ce terme, qui est très lié au contexte colonial. C’est maintenant une valeur positive (prochaine Biennale de Lyon : Partage d’exotismes).

Le Post-multi-culturalisme : la force est-elle aujourd’hui du côté des artistes non-occidentaux qui, non seulement, possèdent leur propre culture, et qui, en plus, connaissent parfaitement la culture occidentale et la jugent.

Chen Zhen : Aujourd’hui l’artiste doit se concentrer sur la création et sur les inter-contextes de création entre les lieus. L’Occident ne doit plus être une cible centrale, les cibles doivent être multiples. Il faut passer de l’esprit de traduction à la volonté d’apprendre de nouvelles langues.

Jean-Hubert Martin : Les relais entre les Centres d’art internationaux existent. Aujourd’hui les artistes ont accès à des réseaux internationaux. Depuis 2 ans des artistes non-occidentaux se sont installés à New York et bénéficient de l’atout d’être exposés dans des lieux alternatifs. Les grands musées d’Art Modernes résistent à cette ouverture et à cette multiplicité.
La prochaine Biennale de Lyon présentera des artistes venus d’ailleurs, totalement inconnus du monde occidental et qui, eux-mêmes ne connaissent pas les grands marchands comme Saatchi ou Castelli !

Intervenants

Jean-Hubert Martin
Chen Zhen

Date
Horaire
19h00
Adresse
Fondation Pernod Ricard
1 cours Paul Ricard
75008 Paris
Entrée libre