Plateaux (2021) est une conférence-performance sonore et expérimentale émanant de la traduction d’un jeu de Go en partition musicale. Il s’agit d’une traduction de la rencontre historique qui a vu en mars 2016 l’Intelligence Artificielle AlphaGo l’emporter sur le champion du monde Lee Sedol. Cette œuvre ambitieuse intitulée Plateaux se veut une réflexion sur le système de pensée autour du jeu asiatique multimillénaire présenté par Herman Hesse dans son roman « Le Jeu des perles de verre » (1943) comme la synthèse de la culture humaine, capable de saisir tous les champs de la connaissance, de la musique aux mathématiques. Et c’est cette synthèse que propose de réaliser Farah Khelil à travers cette œuvre originale, fruit d’une interrelation entre différentes disciplines : philosophie, mathématique, musique, jeu et art. Particulièrement complexe, le Go est un jeu de stratégie pure dont l’objectif est une subtile conquête de territoire consistant à faire du dehors un territoire dans l’espace, à déterritorialiser l’ennemi ou soi-même, à construire un second territoire adjacent, comme l’expliquent Gilles Deleuze et Felix Guattari dans Mille Plateaux (1972). Avec Michaël Bertin, ingénieur au CEA, Farah Khelil propose ici une nouvelle version de traduction sonore tout en donnant à voir son processus grâce à une série d’images et de graphiques projetés.
Plasticienne mais aussi théoricienne, Farah Khelil s’intéresse sous des formes plastiques diverses aux questions de transcription, traduction et de codage qui côtoient les interrogations philosophiques sur la définition de l’art. Elle construit un espace logique où théorie et pratique sont à la fois agencées et dispersées dans l’espace, comme dans une encyclopédie. Privilégiant une pensée du multiple, l’artiste opère des va-et-vient entre visible et lisible, savant et populaire, intime et académique.
Le programme Partitions (Performances) mené depuis 2011 par Christian Alandete explore les liens entre la conférence et la performance.
